Bernard Dubant et Michel Marguerie "Castaneda - le Saut dans l'inconnu" page 16 - les 'attentions"

Publié le 17 Juillet 2019

 

"Mais les deux mondes, celui "grossier" et celui "subtil" pour employer la terminologie hindoue, étaient dus à deux attentions, dépourvus qu'ils sont d'ipséïté, sont deux rêves, deux longues  "visions" et le monde de l'attention première, celui du tonal, celui que l'on dit quotidien et banal, n'est en fait pas banal du tout.

Don Juan explique à Castaneda que lorsque l'apprenti laisse pénétrer dans sa bulle de perception le "nagual", c'est-à-dire lorsqu'il est "ouvert", il s'aperçoit que le "tonal" aussi n'est qu'une longue vision. C'est ce qui lui permet de dire "Pour moi le monde est étrange parce que prodigieux, effrayant, incommensurable".

Mais pour avoir cette conviction, il faut "arrêter le monde, c'est-à-dire arrêter de se parler, de forger sans cesse le monde de l'attention première, s'arrêter pour reconsidérer, ce qui revient à accrocher son deuxième anneau de pouvoir, donc à forger l'autre monde.

Ce n'est que lorsque l'autre monde est, ne serait-ce qu'un "aperçu", que le monde de l'attention première perd sa nature absolue et, de ce fait, son aspect ennuyeux.

Le monde de n'importe quelle attention est "étrange" parce qu'il ne repose sur rien. Aussi Don Juan dit-il à Castaneda que "l'explication des sorciers" n'est qu'une explication qui ne vaut en définitive que pour être opposée à celle habituelle.

La voie du guerrier n'est pas une promenade dans des mondes que l'on pourrait dire "intermédiaire", le monde de l'attention seconde n'est pas perçu pour que l'apprenti en soit captif ; mais, se libérant de l'exclusivité de l'attention première, il se libère par la même de l'exclusivité de l'attention seconde, et réciproquement.

L'exploration d'un autre monde est donc le meilleur moyen de savoir "avec son corps" avec une certitude que ne peut avoir la raison, gardienne jalouse du tonal, que tout n'est que représentation, que nous "ne sommes pas cela", et que ce qui est "soi" ne peut s'identifier à rien. Que par conséquent, tout phénomène est non-phénomène.

Cette percée au-delà des représentations est la tierce attention. Les deux attentions sont ce que Don Juan appelle "la totalité de soi-même". Les réunir impeccablement, c'est accéder à la troisième.

......

Il est bien inutile de faire des classifications pour le seul "plaisir de l'esprit", c'est à dire le renforcement de l'attention au tonal.

Mais il faut bien préciser qu'il ne s'agit pas de "curiosités" vaines dont le résultat serait l'extravagance,.......Il s'agit de parcourir dans tous les sens un "chemin qui a du coeur" le chemin de toutes les possibilités qui sont la totalité de l'être.

Ainsi, marcher sur terre devient dans cette perspective tout aussi mystérieux que "rêver" et "voir" (11)

C'est, comme chaque chose, "un mystère infini d'être".

Le rêve et la veille sont deux rêves, ou plutôt un seul rêve, le jour est aussi sombre que la nuit et la nuit aussi claire que le jour. La seule réalité est cette toile de fond, qui est "au-delà, au-delà de la rive".

(11) "chacun de nous n'est jamais qu'en sommeil. L'état de veille que nous vivons actuellement, n'est pas autre chose qu'un rêve. Et le rêve ne peut se dérouler que pendant le sommeil " - Maharshi

 

Bernard Dubant et Michel Marguerie "Castaneda - le Saut dans l'inconnu" page 16 - les 'attentions"

Rédigé par Agnès

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